Page:Œuvres complètes de Delphine de Girardin, tome 2.djvu/467

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
461
DE PONTANGES.

M. Dulac ! mais au contraire, c’est lui qui m’a conseillé de l’engager à venir chez moi pour la rassurer.

— Ah ! c’est lui qui vous a donné ce conseil, et vous l’aidez dans ses projets ? C’est une vengeance indigne de vous…

— Je ne vous comprends pas.

— Quoi ! vous n’avez pas deviné qu’il s’amuse à rendre ma femme jalouse à son profit ?

— Non, je n’ai pas deviné cela ; mais quand cela serait, que vous importe ?

— Comment ! mais il m’importe beaucoup… J’empêcherai bien Ferdinand de me jouer un mauvais tour.

— Vrai ! je vous croyais très-philosophe.

— Non pas ; sur ce sujet, je ne plaisante pas.

— Avez-vous donc le préjugé du mariage ? dit Laurence avec la plus joyeuse malice et rappelant les discours que Lionel avait tenus sur le mariage à Pontanges.

— Préjugé ! s’écria-t-il ; je n’appelle pas cela préjugé.

— Vous avez bien changé d’idée, reprit-elle en essayant de ne pas rire. Vous disiez autrefois : Le mariage est une association d’intérêts et non de sentiments ; c’est une imposture spirituelle pour donner des garanties à la société, une fiction ingénieuse. Les maris eux-mêmes n’y croient pas. Ils savent bien que la fidélité est impossible, et, il faut leur rendre justice, ils n’y prétendent plus. — Vous y prétendez cependant, vous !

Lionel était piqué, il se trouvait désarmé ; il s’en tira par la fatuité.

— Vous avez bonne mémoire, madame ; mais n’avez-vous retenu que cela ?

Laurence rougit.

— J’ai choisi dans mes souvenirs le moins dangereux.

— Je vous cherche partout, madame ! dit un grand jeune homme aux cheveux blonds. Vous m’avez promis cette valse.

Madame de Pontanges prit le bras de l’élégant Alfred de J…, et M. de Marny la suivit dans la salle de bal pour la voir valser.

C’est alors qu’il en devint éperdument amoureux. C’était un autre aspect ; qu’elle lui parut belle ! que de légèreté, que de