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DE PONTANGES.

si bonne, si pure La fièvre t’égare, Clémentine… ne parle pas… sois raisonnable ; si tu te tourmentes ainsi, tu perdras ton enfant.

— J’étouffe… j’étouffe ! embrasse-moi vite !… Et mon père !… mon père !… je ne le reverrai donc pas ?… Valérie !… ma sœur !… Ô Lionel !…

Elle ne dit plus rien, elle resta immobile sur son lit.

Le médecin arriva. — C’est un spasme, dit-il.

On fit à la malade une saignée abondante.

Puis l’accoucheur prononça le nom de la princesse Charlotte.

Lionel tressaillit.

M. Bélin entra. À peine eut-il jeté un regard sur sa fille, qu’il comprit son malheur.

— Sa pauvre mère, dit-il d’une voix étouffée, sa pauvre mère mourut comme cela !

Il s’approcha du lit. Clémentine était toujours sans connaissance… Il se pencha vers elle.

— Elle respire encore, dit-il.

Il y avait quelque chose d’horrible dans ces mots… Pendant ce temps, on prodiguait tous les soins imaginables à la mourante.

Lionel espérait malgré le danger… tant de jeunesse laisse presque toujours des chances.

Six heures… six longues heures se passèrent ainsi… Clémentine mit au monde un enfant qui vécut à peine quelques instants.

On espéra jusqu’au matin sauver la mère ; mais, quand le jour se leva, Clémentine était encore immobile, évanouie…

Ses pieds, ses mains étaient glacés.

Les médecins qu’on avait fait appeler de toutes parts, en toute hâte, venaient de moment en moment, l’un après l’autre, lui tâter le pouls.

M. Bélin interrogeait leurs visages.

Enfin, on vit l’un d’eux froncer le sourcil, puis recommencer une dernière épreuve. Le cœur ne bat plus ! dit-il.

— Morte ! s’écria Lionel en tombant à genoux.

Un cri se fit entendre dans la chambre voisine.

— Ma fille ! ma fille ! dit M. Bélin en courant vers la