Page:Œuvres complètes de Saint Ennodius, évêque de Pavie, tome 1, 1906.djvu/114

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De grâce, prenez garde que la malignité ne souffle sur vos fleurs son haleine brûlante, ou ne lâche parmi vos rosiers quelque animal furieux. Jamais on ne cache à des amis, sans les fâcher, un événement heureux: un secret ressentiment peut seul faire taire aux absents retenus au loin, la joie qui vous arrive. Ecartez, je vous en prie, de votre façon d’agir, toute funeste inspiration de la malveillance. Je m’imagine que si j’ai mérité d’ignorer votre bonheur, c’est qu’un tel silence doit me valoir, dans la fréquence de vos entretiens, une large compensation. L’ami frustré dans ses désirs reste insensible à tout témoignage d’affection. Vous aurez beau, mon cher seigneur, épuiser, pour y remédier, toutes les figures de votre savante rhétorique, il est bien rare que des méfaits soient oubliés sur de beaux discours. Vous aurez de la peine à effacer en écrivant ce que vous avez dédaigné d’écrire. Mais je reviens à mon sujet duquel, avec la miséricorde divine, jamais je ne m’écarterai. Je dois à Dieu d’avoir été le premier, malgré votre soin de garder le silence, à connaître en Ligurie votre prospérité. Vous avez perdu tout le bénéfice de votre application à vous taire; le bonheur des gens de bien se divulgue par la voix publique; ce qui arrive d’heureux à ceux qui tiennent le sommet de l’échelle sociale, ne peut rester ignoré. Parmi les honneurs il faut choisir de préférence ceux auxquels on a comme un droit naturel : on ne se trouve pas à sa place lorsque l’on obtient les faisceaux sans reconnaître parmi les