Page:Œuvres d’Éphraïm Mikhaël (Lemerre, 1890).djvu/168

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savants et des sages et des docteurs de la Loi, lui seul a connu l’infirmité de la Raison, et il pense aux hommes qui portent à travers les âges, comme un précieux et pesant reliquaire, le ridicule sens commun, et parce qu’il l’a dédaigné il se glorifie en son cœur.

Or, parmi la foule du port, apparaît un étranger vêtu d’un manteau de laine d’une forme noble et surannée. Ses yeux, pareils à des gemmes antiques, semblent garder des souvenirs de visions primordiales, et sous ses pieds les dalles frémissent respectueusement.

Au moment où le poète Azahel est descendu parmi la foule, l’étranger a levé les bras au ciel et maintenant il s’écrie, avec une voix qui retentit comme les clairons, des temples : « Hommes, je suis un prophète de Dieu. Je suis venu pour vous faire entendre la Parole, et ceux qui voudront me suivre, je les mènerai, en marchant sur les flots de la mer, dans la véritable Terre Promise. » Alors s’éleva dans la foule une rumeur de désappointement. Des jeunes gens, après avoir regardé alternativement le prophète et le ciel où s’épaissit le brouillard vespéral, s’en vont d’un pas négligent. Des savants observent silencieusement, et des mar-