Page:Œuvres d’Éphraïm Mikhaël (Lemerre, 1890).djvu/188

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grouillait un peuple d’infirmes, de mutilés, de lépreux. Une hideuse foule malade entourait Phërohil. Des nains se traînaient à ses genoux ; des enfants sans pieds rampaient devant lui. Les plaies, les ulcères, les pustules s’étalaient avec une espèce d’ironique orgueil ; les muets grognaient mystérieusement ; les aveugles, du fond de leurs grandes ténèbres familières, se lamentaient. Des mains difformes se tendaient ; des doigts velus saisissaient aux franges la robe royale. Dans les maisons entr’ouvertes, sur des lits pollués et sanglants, des accouchées haineuses et furieuses hurlaient comme des bêtes blessées. Des vieillards, trop faibles pour descendre dans la rue, collaient aux fenêtres leurs visages de spectres. Partout de monstrueux suppliants surgissaient qui semblaient s’être levés du cercueil, et des hommes criaient avec des bouches toutes noires comme s’ils avaient mordu déjà la terre tumulaire.

Le roi passait, disant des paroles de consolation, jetant l’or à poignées. Quelquefois, écœuré, oppressé d’un ineffable malaise, il voulait s’enfuir des horribles rues. Mais le Mage, inflexible, le ramenait, le guidait, le forçait à voir. D’ailleurs les mendiants, maintenant, les