Page:Œuvres d’Éphraïm Mikhaël (Lemerre, 1890).djvu/193

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voile nuptial, l’embrassaient en pleurant. Quelques-uns, pour respirer encore les parfums émanés de la reine, assaillaient le char ; ils se penchaient vers la robe embaumée et restaient là, éperdus, défaillants, sans que le fouet des esclaves pût les faire fuir. D’autres, les bras ouverts comme pour une étreinte de possession, se jetaient au-devant du cortège. Les durs timons garnis de clous les frappaient à la poitrine et ils roulaient dans la poussière extasiés et sanglants. Il y en eut aussi qui se couchèrent d’eux-mêmes sur la route et qui, les yeux tournés vers la fugitive, se laissèrent voluptueusement meurtrir et tuer par les lourds chevaux. Mais les mieux épris ne purent se résoudre à perdre la reine. Obstinément ils coururent derrière elle. On leur lança des pierres, on les frappa de bâtons noueux, on lâcha sur eux des lévriers et des molosses ; mais, mordus et ensanglantés, ils suivirent encore.

Phërohil, en sortant du palais, s’en allait superbement, enlaçant d’un bras l’épouse choisie, les yeux noyés d’un surnaturel bonheur. Mais peu à peu, dans la mêlée lamentable de la foule, il sentit faiblir sa joie. Brus-