Page:Œuvres d’Éphraïm Mikhaël (Lemerre, 1890).djvu/204

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multanément toutes les plaies de la terre : l’amour, l’infirmité, le deuil, la misère, la défaite, l’esclavage, l’inique et déloyal massacre. C’en était trop. Cet enfant, que j’avais savamment accoutumé à se meurtrir aux douleurs des autres, voulut enfin s’affranchir de ce long supplice d’aimer. Vous le voyez, je n’ai pas employé des philtres ni des formules d’enchantement. Il m’a suffi de rendre Phërohil à peine différent de ce que nous sommes. Est-ce que nous n’avons pas, nous aussi, pour toutes les souffrances de la terre une parole de pitié ? Seulement cette parole est vaine et menteuse. Phërohil, lui, sentit vraiment ce que nous exprimons tous devant le malheur. Il fut bon comme vous vous vantez de l’être, mais il fut sincère comme vous croyez l’être. C’est pourquoi volontairement son corps se brisa aux rocs de la montagne. »

Tandis que le Mage parlait, une douce aurore de printemps fleurissait le ciel. En bas, dans les campagnes, une blanche procession s’épandait.

Des jeunes filles portant sur la tête des cruches d’or marchaient entre les haies d’églantines. Des enfants poussaient devant eux, vers