Page:Œuvres de Blaise Pascal, XI.djvu/183

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Justes en un sens ; et qu’en un autre sens, les Commandemens sont quelquefois impossibles aux Justes ; que Dieu ne laisse jamais le juste, [1]s’il ne le quitte, et qu’en un autre sens, Dieu laisse quelquefois le Juste le premier, et qu’il faut estre ou bien aveugle ou bien peu sincère, pour trouver de la contradiction dans ces propositions qui subsistent si facilement ensemble, puis que ce n’est autre chose, que dire que les Commandemens sont toujours possibles à la Charité, que tous les Justes n’ont pas toujours le pouvoir de persévérer : ce qui n’est point contradictoire ; et que Dieu ne refuse jamais ce qu’on luy demande bien dans la prière ; et que Dieu ne donne pas toujours la persévérance dans la prière ; ce qui n’est en aucune sorte contradictoire.

Voilà ce que j’avois à vous dire sur ce sujet, où je suis bien aise d’estre entré pour vous faire voir que les propositions qui sont contradictoires dans les parolles, ne le sont pas toujours dans le sens. Et parce que vous avez pensé souvent trouver de la contradiction dans les choses que j’ay eu l’honneur de vous dire, et que l’on voit aujourd’huy un nombre de personnes assez téméraires pour avancer qu’il y a de la contradiction dans les sentimens de saint Augustin, je ne puis refuser une occasion si commode de vous ouvrir amplement les principes qui accordent si solidement toutes ces propositions contradictoires en apparence, mais en effet liées ensemble par un enchaînement admirable.

  1. G. [si celuy-ci].