Page:Œuvres de Blaise Pascal, XI.djvu/187

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l’homme, et que l’homme prévient Dieu ; que Dieu donne sans qu’on demande, et que Dieu donne ce qu’on demande ; que Dieu opère sans que l’homme coopère, et que l’homme coopère avec Dieu ; que la gloire est une grâce et une recompense : que Dieu quitte le premier, et que l’homme quitte le premier[1] ; que Dieu ne peut sauver l’homme sans l’homme, et que ce n’est nullement de l’homme qui veut et qui court, mais seulement de Dieu qui fait miséricorde.

Par où vous voyez que presque tout ce que les Semi-pelagiens ont dit de la Justification en commun, est véritable de ses effets particuliers[2]. Et qu’ainsi on peut dire les mesmes choses qu’eux sans estre de leur sentiment, à cause des differens objets des mesmes propositions ; et qu’ainsi toutes les expressions suivantes sont communes à saint Augustin et à ses adversaires :

Les Commandemens sont toujours possibles aux Justes ; Dieu ne nous sauve point sans nostre coopération ; Nous garderons les Commandemens si nous voulons ; Il est en nostre pouvoir de garder les Commandemens ; Il est en nostre pouvoir de changer nostre volonté en mieux ; La gloire est donnée aux mérites ; Demandez, et vous recevrez ; J’ay attendu le Seigneur ; J’ay prévenu le Seigneur ; Tous les

  1. Vide supra p. 97, n. 1 : cf. Pensées, fr. 514, T. II, p. 413.
  2. Cf. Pensées, fr. 777, T. III, p. 220 : « Les effets, in communi et in particulari : Les semy pelagiens errent en disant in communi ce qui n’est vray que in particulari ; et les calvinistes en disant in particulari ce qui est vray in communi (ce me semble). »