Page:Œuvres de Blaise Pascal, XI.djvu/200

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ayant dit : J’ay travaillé plus queux tous, il ajouste : Non pas moy, c’est-à-dire, Je n’ay point travaillé, mais sa grâce qui est avec moy a travaillé. Par où on void qu’il attribue son travail à sa volonté, et qu’il le refuse à sa volonté suivant qu’il en cherche ou la cause seconde, ou la première cause ; mais jamais à soy seul ; au lieu qu’il la donne aussi à la grâce seule, Et que c’est en parlant proprement qu’il le donne à la seule grâce. C’est ainsi qu’il dit : Je vis non pas moy, mais Jesus-Christ en moy. Il dit donc Je vis, et il ajoute Je ne vis pas. Tant il est vray que la vie est de luy, et qu’elle n’est pas de luy, suivant qu’il en veut marquer ou la cause première ou la cause seconde. Mais, à proprement parler, il attribue cette vie à Jesus-Christ, et jamais à luy seul.

Voilà l’origine de toutes ces contrarietez apparentes, que l’Incarnation du Verbe qui a joint Dieu à l’homme, et la puissance à l’infirmité, a mises dans les ouvrages de la grâce.

Vous ne vous étonnerez pas après cela de voir dans St Augustin de ces contrarietez pareilles à celles de l’Ecriture. Je ne vous en marqueray qu’un ou deux des principaux[1] [endroits], comme celuy-cy : Cette lumière ne repaist pas les yeux des animaux brutes, mais les cœurs purs de ceux qui croient à Dieu, et qui se convertissent de l’amour des choses visibles, à l’accomplissement des préceptes : Ce que tous lés hommes peuvent, s’ils le veulent.

  1. Mot ajouté par Bossut.