Page:Œuvres de Blaise Pascal, XI.djvu/204

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paroist par cette expression mesme : La persévérance peut estre méritée par les prières.

[1]C’est ainsi qu’il ne se contredit pas, lorsque ayant établi par tous ces principes, que la grâce est tellement efficace et nécessaire que l’homme ne quitte jamais Dieu, si Dieu ne le laisse auparavant sans ce secours, puis que, tant qu’il lui plaît de le retenir, l’homme ne s’en sépare jamais, il ne laisse pas de dire en quelques endroits que Dieu ne quitte point le Juste, que le Juste ne l’ait quitté, parce que ces deux choses subsistent ensemble, à cause de leur différent sens. Car Dieu ne cesse point de donner ses secours à ceux qui ne cessent point de les demander ; mais aussi l’homme ne cesseroit jamais de les demander, si Dieu ne cessoit de luy donner la grâce efficace de les demander : De sorte qu’en cette double cessation, il arrive qu’en Dieu commence l’une toujours, et qu’il ne commence jamais l’autre.

Ce double délaissement, l’un dans lequel Dieu commence, et l’autre dans lequel Dieu suit, vous est marqué clairement dans S. Prosper, lors qu’il dit : Dieu ne quitte point si Von ne le quitte, et il fait bien souvent qu’on ne le quitte point. Mais d’où vient qu’il retient ceux-cy, et qu’il ne retient pas ceux-là ? Il n’est ny permis de le chercher, ny possible de le trouver. Où l’on void qu’à la vérité Dieu ne quitte point si l’on ne le quitte : voilà un délaissement

  1. Cf. infra p. 192, une autre rédaction de ce même passage.