Page:Œuvres de Blaise Pascal, XI.djvu/273

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Dieu ou de sa colère, parce que rien nest en nostre puissance que ce qui suit nostre volonté, laquelle lorsque Dieu la prépare forte et puissante, la mesme action de pieté devient facile qui estoit difficile et mesme impossible auparavant.

Il est donc bien visible qu’en prenant le mot de pouvoir en ce sens, tous les hommes ont celuy d’accomplir les préceptes. Et cependant il est véritable en un autre sens que ceux qui n’en sont pas instruits comme les Infidèles, n’ont pas le pouvoir de les accomplir, puisqu’ils les ignorent. Car comment s’acquitteront-ils d’une obligation qu’ils ne sçavent pas leur estre imposée ? ou comment invoqueront-ils celuy auquel ils ne croyent pas ? ou comment croiront-ils en celuy dont ils n’ont point ouy parler ? ou comment en entendront-ils parler sans prédicateur ?

Et c’est ce qui a fait dire à St Augustin : Il est nécessaire et inévitable que ceux qui ignorent la justice la violent. Necesse est ut peccet a quo ignoratur justilia[1]. Et ailleurs[2] : On peut bien dire à un homme : Vous persévéreriez si vous le vouliez dans les choses que vous avez apprises et tenues ; mais on ne peut dire en aucune sorte : Vous croiriez si vous le vouliez les choses dont vous n’avez point ouy parler. D’où l’on voit que les Chrétiens qui sont instruits

  1. Aug. Oper. imperf. l. 1. n. 108. Texte cité dans la 4e Provinciale, cf. supra T. IV, p. 265.
  2. Aug. Corr. et grat. c. 7… potest dici, homo in eo quod audieras et tenueras, in eo perseverares si velles ; nullo modo autem dici potest, id quod non audieras crederes si velles.