Page:Œuvres de Blaise Pascal, XI.djvu/274

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de la Loy de Dieu ont par cette connoissance un pouvoir de l’accomplir, qui n’est pas commun à ceux qui en sont privez, puisque connoissant la volonté de leur maistre, il ne dépend plus que de leur consentement d’y obeïr.

Mais on peut dire avec bien plus de raison des Justes, qu’ils ont toujours le pouvoir de les observer, puisque leur volonté estant dégagée des liens qui la retenoient captive, et se trouvant guérie de ses langueurs (quoy qu’il luy en reste quelque foiblesse qui n’empesche pas qu’on ne puisse dire avec les Pères qu’elle est libre, saine et forte), il est visible qu’ils ont un pouvoir d’observer les Commandemens, qui n’est pas commun à ceux qui estant asservis sous l’amour des créatures ont une opposition à Dieu et des passions dominantes, qui les empeschent de suivre et d’observer sa loy.

Car de la mesme sorte qu’on dit d’un œil qu’il a le pouvoir de voir, quand il n’y a aucune indisposition intérieure qui empesche cet exercice, de mesme on peut dire avec vérité de la volonté de l’homme quand elle est dégagée des passions qui y dominoient auparavant, qu’elle a alors le pouvoir d’aimer Dieu.

Ce n’est pas qu’elle n’ait encore besoin d’estre secourue de la grâce, quelque saine qu’elle soit. Car, comme dit St Augustin[1], de la mesme sorte que

  1. Aug. de Nat. et gratia, c. 26, cité dans la Trias, lib. III, c. 2, art. XIV, [p. 336] : Sicut enim oculus corporis etiam plenissime sanus, nisi candore lucis adjutus non potest cernere : sic homo etiam perfectissime justificatus, nisiseterna luce justitiœ divinitus adjuvetur, recte non potest vivere.