Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/116

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mes tourments à vos montagnes ; seuls, Arcadiens, vous savez chanter. Oh ! que mollement reposera ma cendre, si votre flûte un jour redit mes amours ! Et plût aux dieux que j’eusse été l’un de vous, ou gardien de vos troupeaux, ou vendangeur de vos grappes mûries ! Du moins, quel que fût l’objet de ma flamme, Phyllis, Amyntas, ou tout autre, (et qu’importe qu’Amyntas soit basané ? la violette aussi est noire, et noir le vaciet), il reposerait avec moi parmi les saules, à l’ombre des pampres flexibles. Pour moi Phyllis tresserait des guirlandes de fleurs, Amyntas chanterait. Ici, Lycoris, sont de fraîches fontaines, de molles prairies, d’épaisses forêts : ici je coulerais mes jours avec toi. Mais maintenant un fol amour me retient sous les drapeaux de Mars, au milieu des armes et des traits ennemis. Loin de ta patrie (que ne puis-je en douter !), tu braves les neiges des Alpes et les glaces du Rhin, seule, hélas ! et sans moi ! Ah ! puisse le froid t’épargner ! puissent les durs glaçons ne point blesser tes pieds délicats !

« J’irai ; je chanterai sur les pipeaux du pasteur de Sicile les vers que m’inspira le poëte de Chalcis. C’est décidé, j’aime mieux souffrir au milieu des forêts, dans les repaires des bêtes sauvages, et graver mes amours sur la tendre écorce des ar-