Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/178

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Enfin ton choix est fait : la saison des amours approche ; hâte-toi, redouble de soins pour donner un embonpoint solide et ferme à celui que tu as appelé à guider et à perpétuer le troupeau. On coupe pour lui l’herbe nourrissante, on l’abreuve de l’eau du fleuve, on lui prodigue le grain, de peur qu’il ne puisse résister à ses douces fatigues, et que sa débile postérité ne porte les traces de son épuisement. Pour les mères, il n’en est pas de même : on les amaigrit à dessein, et quand la volupté qu’elles ont déjà connue commence à réveiller en elles les désirs amoureux, on leur retranche le feuillage, on les éloigne des fontaines. Souvent même on les fatigue par des courses forcées sous un soleil ardent, alors que l’aire retentit sous le fléau, et que la paille légère s’envole au premier souffle du zéphyr. C’est ainsi qu’on empêche un embonpoint excessif d’engorger le champ de l’amour et d’en obstruer les sillons inertes ; de sorte que la femelle saisit avec avidité les germes fécondants, et en est profondément pénétrée.

Les soins jusque-là donnés aux pères, les mères les réclament. Quand au bout de quelques mois, chargées de leur fruit, elles prennent une allure plus pesante, ne leur laisse plus traîner de lourds chariots, traverser les routes en sautant, s’enfuir au galop dans les champs ou se jeter à la nage dans les eaux rapides.