Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/197

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ment des génisses pour les fêtes de Junon, et que des buffles d’inégale grandeur conduisirent aux temples le char et les offrandes. On vit donc des malheureux, pour enfouir les graines, déchirer péniblement la terre avec le hoyau, y enfouir même les semences avec leurs ongles, et jusqu’au sommet des montagnes traîner, le cou tendu, des chariots criant sous l’effort.

Le loup ne va plus la nuit rôder autour du bercail pour surprendre les troupeaux : un mal, plus violent que la faim, a dompté sa rage. Le daim timide, le cerf que tout alarmait, errent maintenant confondus avec les chiens, autour des demeures de l’homme. Les habitants de la vaste mer, et tout ce qui nage dans ses abîmes, gisent sur le rivage, comme autant de cadavres naufragés qu’y ont jetés les flots. Les phoques se réfugient dans les fleuves, étonnés de les recevoir. La vipère, mal défendue par sa retraite souterraine, expire, et l’hydre, effrayée, dresse vainement ses écailles. Aux oiseaux même l’air est mortel, et ils tombent sur la terre, laissant la vie au sein des nuages.

En vain on change de pâturages ; les remèdes se tournent en poison. Les maîtres de l’art, les Chiron, les Mélampe, cèdent à la force du mal. Échappée des gouffres ténébreux du Styx, la pâle Tisiphone exerce aussi ses fureurs ; et, faisant marcher devant