Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/205

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui, deux fois l’année, se couvre de fleurs. Je peindrais la chicorée joyeuse d’être arrosée, le persil ornant les rives de sa verdure, et le tortueux concombre se traînant sur l’herbe où son ventre grossit ; je n’oublierais ni le narcisse lent à s’épanouir, ni l’acanthe flexible, ni le lierre pâle, ni le myrte ami des rivages.

Non loin des tours superbes de Tarente, aux lieux où le noir Galèse arrose de brillantes moissons, j’ai vu, il m’en souvient, un vieillard cilicien, possesseur de quelques arpents d’un terrain longtemps abandonné, sol rebelle à la charrue, peu propre aux troupeaux, peu favorable à la vigne. Toutefois, au milieu des broussailles, le vieillard avait planté quelques légumes bordés de lis, de verveine et de pavots. Avec ces richesses, il se croyait l’égal des rois ; et, quand le soir, assez tard, il rentrait au logis, il chargeait sa table de mets qu’il n’avait point achetés. Le premier il cueillait la rose du printemps, le premier les fruits de l’automne ; et lorsque le triste hiver fendait encore les rochers, et enchaînait de ses glaçons le cours des fleuves, lui déjà émondait les rameaux de la flexible acanthe, accusant la lenteur du printemps et la paresse des zéphyrs. Aussi voyait-il, le premier, de ses ruches fécondes, sortir de nombreux essaims, et le miel