Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/273

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bonne foi, s’il en reste encore parmi les hommes, je vous en conjure, ayez pitié de tant de misères, ayez pitié d’un malheureux, digne d’un meilleur sort. »

À ses larmes nous accordons sa grâce, et nous prenons pitié de lui. Priam, le premier, ordonne lui-même qu’on détache ses liens, et le rassure en ces termes amis : « Qui que tu sois, dès ce moment oublie les Grecs perdus pour toi : tu seras des nôtres ; mais réponds avec vérité à ma demande. Pourquoi ont-ils construit ce cheval monstrueux ? quel en est l’inventeur ? quel en est le but ? est-ce une offrande aux dieux, ou bien est-ce une machine de guerre ? »

Il dit, et, versé dans les ruses et les artifices des Grecs, Sinon tend vers les astres ses mains libres de chaînes : « Ô vous, feux éternels, s’écrie-t-il, divinités inviolables, je vous atteste ; et vous aussi, autels et glaives homicides auxquels je me suis dérobé ; bandelettes des dieux que j’ai portées comme victime ! je peux sans crime rompre les liens sacrés qui m’attachaient aux Grecs : il m’est permis de les haïr et de révéler tous leurs secrets, et je ne suis plus retenu par aucune loi de ma patrie. Mais vous, Troyens, demeurez fidèles à vos promesses ; et, si je dis la vérité, si, pour payer la vie que vous me laissez, je vous rends un important service, sauvez celui qui sauve Troie.

« Tout l’espoir de la Grèce et sa confiance dans la guerre