Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/283

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tecteurs de cet empire ! Vous défendez une ville embrasée ! mourons, et précipitons-nous au milieu des armes. Le seul salut pour les vaincus est de n’attendre aucun salut. » Ces mots ajoutent au courage la fureur. Tels que des loups dévorants qui, pressés d’une faim cruelle, s’élancent en furie, à travers les brumes de la nuit, attendus dans leurs repaires par des louveteaux altérés de carnage, tels à travers les traits, à travers les ennemis, nous courons à une mort qui semble inévitable. Nous marchons au centre de la ville : la nuit épaisse nous enveloppe de ses vastes ombres.

Oh ! qui pourrait peindre les désastres de cette nuit ! qui pourrait dire tant de funérailles, et, pour tant d’infortunes, avoir assez de larmes ! Elle tombe cette ville antique, si longtemps reine de l’Asie. Des milliers de cadavres jonchent de tous côtés et les rues, et les maisons, et le seuil sacré des temples. Mais le sang des Troyens ne coule pas seul : parfois aussi le courage renaît dans le cœur des vaincus, et les vainqueurs succombent à leur tour. Partout le deuil, partout la terreur, et partout l’image de la mort.

Le premier des Grecs qui s’offre à nous est Androgée, que suit une troupe nombreuse : il nous croit des siens, et, dans son erreur, il nous adresse le premier ces paroles amies : « Hâtez-vous,