Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/411

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Déjà neuf jours se sont écoulés dans la solennité des sacrifices et dans la joie des festins : les vents paisibles ont aplani les mers ; l’Auster, par son haleine favorable, ne cesse d’appeler les Troyens sur les ondes. Alors retentissent sur tout le rivage de tristes gémissements ; le jour et la nuit, les pleurs et de longs embrassements retardent les adieux ; et déjà ceux que naguère épouvantaient l’aspect de la mer et l’affreux courroux de Neptune, les femmes elles-mêmes, veulent partir et braver tous les maux de l’exil. Mais, par des paroles amies, Énée les console avec bonté, et les recommande en pleurant à son compatriote Aceste. Puis il ordonne qu’on immole à Éryx trois jeunes taureaux, aux Tempêtes une jeune brebis, et qu’on détache, dans l’ordre accoutumé, les câbles qui retiennent les vaisseaux au rivage. Lui-même, la tête ceinte d’une couronne d’olivier, et debout sur la proue, il tient à la main une coupe, jette les entrailles des victimes dans l’onde amère, et y répand des libations de vin. Le vent s’élève et suit en poupe les vaisseaux : les rameurs frappent à l’envi la mer et soulèvent les flots écumants.

Cependant, toujours inquiète, Vénus aborde Neptune, et se plaint en ces termes : « L’implacable colère de Junon, et sa haine que rien ne peut assouvir, me forcent, ô Neptune ! à descendre