Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/413

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colère furieuse du ciel et de la mer. Sur la terre même, j’en atteste le Xanthe et le Simoïs, mes soins ont veillé sur votre fils. Lorsque le terrible Achille, poursuivant les Troyens, repoussait sous les remparts de Pergame leurs phalanges éperdues, et par milliers les livrait à la mort ; quand les fleuves gémissaient regorgeant de cadavres, et que le Xanthe, arrêté dans son cours, ne pouvait plus rouler son onde vers la mer, Énée osa se mesurer avec le vaillant fils de Pélée, sans posséder une force égale, sans avoir, comme lui, la faveur des dieux : je le couvris d’un épais nuage, et l’arrachai au trépas. Cependant alors je voulais renverser cette Troie parjure et ces murs élevés par mes mains. Mes sentiments ne sont point changés : bannissez toute crainte ; votre fils arrivera, sans péril, aux ports de l’Averne. Un seul de ses compagnons, par lui regretté, périra dans les flots : une seule tête sera dévouée pour le salut de tous. »

Neptune, par ces mots, calme et réjouit la déesse. Il attelle ses coursiers, met dans leur bouche un mors écumant, et sa main leur abandonne entièrement les rênes. Son char azuré vole rasant la surface des eaux : l’onde s’aplanit ; la mer gonflée s’abaisse sous l’essieu retentissant, et dans tout le ciel les nuages disparaissent. Dans le nombreux cortége du dieu, à droite, nagent les immenses baleines, et la troupe du vieux Glaucus, et Palémon,