Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/428

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bûcher, jette sur l’assemblée l’eau lustrale qui tombe en légère rosée, et enfin il dit les derniers adieux. Cependant, par les soins du pieux Énée, un vaste tombeau, que décorent les armes du guerrier, sa rame et son clairon, s’élève sur une haute montagne qui porte encore le nom de Misène, et qui, à travers les siècles, gardera ce nom éternel.

Ce devoir accompli, Énée se hâte d’exécuter les ordres de la Sibylle. Dans les flancs d’un rocher, une caverne profonde ouvre sa bouche immense : un lac aux noires ondes et une forêt ténébreuse en défendent l’accès. De ce gouffre horrible s’exhalent d’impures vapeurs qui s’élèvent au plus haut des airs. Nul oiseau ne peut voler impunément sur ce marais, et de là les Grecs lui ont donné le nom d’Averne. D’abord la prêtresse fait conduire en ce lieu quatre taureaux noirs ; elle épanche le vin sur leur front, coupe, entre les cornes, l’extrémité des poils, et jette dans le feu sacré ces prémices, en appelant à haute voix Hécate, puissante au ciel et dans l’Érèbe. D’autres égorgent les victimes, et reçoivent le sang fumant dans les patères. Énée lui-même immole à la mère des Euménides, et à la Terre sa sœur, une jeune brebis à la toison noire, et à toi, Proserpine, une vache stérile. Puis il élève des autels au roi du Styx, livre aux flammes