Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/457

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toi : imposer les lois de la paix, épargner les vaincus, et dompter les superbes. »

Ainsi parlait Anchise ; et, tandis que son fils et la Sibylle admirent, il ajoute : « Vois avec quelle noblesse s’avance Marcellus chargé de dépouilles opimes, et comme il domine de son front victorieux cette foule de héros ! c’est lui qui, sauvant la république d’un grand désastre, terrassera les Carthaginois et les Gaulois rebelles, et, le troisième dans Rome, suspendra au temple de Quirinus les dépouilles opimes prises sur l’ennemi. »

En ce moment, Énée interrompt Anchise (car il voyait marcher à côté de Marcellus un jeune homme remarquable par sa beauté et par l’éclat de ses armes, mais le front triste et les yeux baissés) : « Ô mon père ! dit-il, quel est celui qui accompagne Marcellus ? Est-ce son fils, ou l’un des rejetons de son illustre race ? Quel bruyant cortége l’environne ! et combien il ressemble à l’autre héros ! mais une affreuse nuit enveloppe sa tête d’une ombre funeste. »

Alors Anchise reprend en versant des larmes : « Ô mon fils ! ne cherche point à connaître l’immense deuil de ta famille ! Ce jeune homme, les destins ne feront que le montrer à la terre, et le lui reprendront aussitôt. Dieux immortels ! Rome vous eût paru trop puissante, si elle avait conservé ce don de vos mains.