Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/481

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

oreille. Ne cherche pas à m’effrayer par de telles alarmes : l’auguste Junon ne m’a point oublié. Mais toi, que l’âge a vaincue, toi dont la raison affaiblie connaît mal les faits et la vérité, d’inutiles soucis t’agitent, ô ma mère ! et te rendent, au milieu des querelles des rois, le jouet de vaines terreurs. Borne ta sollicitude aux images et aux temples des dieux, et laisse aux guerriers les soins de la guerre et de la paix. »

Ces mots allument la colère d’Alecton. Turnus parlait encore, qu’un tremblement soudain s’empare de ses membres, et ses yeux restent fixes, tant la furie fait siffler de serpents, tant sa figure apparaît horrible ! Tandis qu’il veut parler et que sa bouche cherche en vain des sons et des paroles, elle lance sur lui des regards enflammés, dresse sur sa tête deux couleuvres, fait résonner son fouet, et de sa bouche furieuse exhale sa rage en ces mots : « Me voilà, dit-elle, moi vaincue par l’âge, et dont la raison affaiblie connaît mal les faits et la vérité ! moi que d’inutiles soins agitent, et qui, dans les querelles des rois, suis le jouet de vaines terreurs ! Regarde ; je viens du séjour des Furies : je porte dans mes mains la guerre et la mort. » Elle dit, et lance sur le jeune guerrier une torche fumante qui brille d’une sombre flamme, et qu’elle lui enfonce dans le cœur.

Turnus est réveillé soudain par un violent effroi, et la sueur