Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/483

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une rage soudaine, frappe leurs narines d’une odeur qui leur est connue, et les lance sur les traces d’un cerf qu’ils poursuivent avec ardeur : telle fut la première cause de tant de maux, et ce fut ainsi que s’allumèrent les fureurs de la guerre dans les champs du Latium.

Un cerf d’une beauté rare et d’une haute ramure, ravi à la mamelle de sa mère, était nourri par les enfants de Tyrrhée, et par Tyrrhée lui-même, intendant des troupeaux du roi et gardien de ses vastes domaines. Docile et soumis, il était l’objet des soins de la jeune Silvie, sœur des fils de Tyrrhée. Elle enlaçait à son jeune bois des guirlandes légères, peignait son poil sauvage, et le lavait d’une onde pure. Se laissant aisément manier, et habitué à la table de son maître, il errait dans les bois, revenait de lui-même vers le seuil connu, et souvent, à une heure avancée de la nuit, regagnait le toit domestique. Ce jour-là, écarté au loin, il suivait le courant du fleuve, et cherchait le frais sur la rive verdoyante, quand la meute d’Iule vient le relancer avec furie. Ascagne lui-même, qu’excite un grand désir d’être loué pour son adresse, lance une flèche de son arc recourbé ; une divinité guide sa main : le trait siffle, vole, atteint le cerf et s’enfonce dans ses flancs. L’animal blessé fuit vers son refuge accoutumé, regagne en gémissant son étable, et, tout sanglant, par un bra-