Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/538

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Lorsqu’Énée construisait ses vaisseaux au pied du mont Ida, et se préparait à parcourir l’immensité des flots, la mère des dieux, Cybèle, adressa, dit-on, ces paroles au grand Jupiter : « Ô mon fils ! accorde à ta mère chérie ce qu’elle demande au maître de l’Olympe. Une forêt de pins, qui couronnait l’Ida, faisait depuis longtemps mes délices : au sommet de la montagne, dans ce bois obscurci de noirs sapins et d’érables touffus, on m’apportait des offrandes. Je donnai ces arbres avec joie au descendant de Dardanus, dépourvu de vaisseaux. Maintenant une terreur secrète m’agite et me tourmente. Dissipe ma crainte, et que les prières d’une mère aient sur toi ce pouvoir : permets que ces vaisseaux résistent, inébranlables, à la fureur des vents et aux courses les plus longues, et que ce soit un titre pour eux d’être nés sur nos montagnes. » — « Ô ma mère ! lui répond le dieu qui régit à son gré les astres du ciel, que demandez-vous aux destins ? Que souhaitez-vous pour ces vaisseaux ! Des navires, ouvrage d’une main mortelle, auraient droit à l’immortalité ! Énée affronterait sans péril tant de périls imprévus ! À quel dieu une telle puissance fut-elle jamais accordée ? Non ; mais lorsque, arrivés au terme de leur course, ils auront touché les bords de l’Ausonie, et conduit le chef Troyen aux champs de Laurente, tous ceux qui auront