Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/539

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échappé à la fureur des flots, je les dépouillerai de leur forme mortelle, pour en faire autant de Néréides, qui, compagnes désormais de Doto et de Galatée, fendront comme elles les vagues écumantes. » Il dit, prend le Styx et ses noirs torrents à témoin de la foi de ses promesses : il fait un signe de tête, et de ce signe il ébranle tout l’Olympe.

Il était donc arrivé, le jour promis, et les Parques avaient accompli les temps fixés, lorsque l’attentat de Turnus avertit Cybèle d’écarter l’incendie loin des vaisseaux sacrés. Tout à coup brille aux yeux une clarté nouvelle : un nuage immense, venu de l’Orient, traverse le ciel, au bruit des chœurs de l’Ida, et une voix formidable retentit dans les airs et frappe d’effroi les Troyens et les Rutules. « Rassurez-vous, Troyens, et ne vous armez point pour défendre mes vaisseaux : Turnus incendiera plutôt les mers que ces pins qui me sont consacrés ; et vous, rompez les liens qui vous arrêtent ; allez, divinités de l’onde, la mère des dieux l’ordonne. » La voix a parlé : soudain les vaisseaux, brisant leur câble, s’éloignent du rivage, plongent et s’enfoncent dans les flots, à la manière des dauphins ; puis (ô prodige !) ils reparaissent et nagent à la surface sous la forme de jeunes nymphes, dont le nombre égale celui des proues d’airain qui bordaient le rivage. Les Ru-