Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/540

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tules s’épouvantent : Messape lui-même s’effraie, et ses coursiers sont saisis d’effroi ; le Tibre étonné ralentit son cours avec un sourd murmure, et remonte vers sa source.

Mais rien n’abat l’audacieuse confiance de Turnus : lui-même, il relève le courage des siens, et les gourmande en ces termes : « Ce sont les Troyens que menacent ces prodiges ; Jupiter leur ravit leur moyen ordinaire de salut ; il leur ferme la mer ; pour eux, plus d’espoir de fuir ; la moitié du monde leur est interdite ; la terre est en notre pouvoir ; l’Italie entière marche contre eux. Que m’importent les oracles et les promesses des dieux dont se vantent les Phrygiens ? Ils ont touché les bords de la fertile Ausonie : voilà leur destinée et les vœux de Vénus accomplis. Et moi aussi, j’ai mes destins : c’est d’anéantir cette race coupable, qui me ravit mon épouse. Les seuls Atrides sont-ils sensibles à un pareil affront ? et Mycènes a-t-elle seule le droit de prendre les armes ? N’est-ce donc point assez pour eux d’avoir péri une fois !… Une seule faute ne suffisait-elle pas à ce peuple, et ne devait-il pas désormais haïr toutes les femmes ? Ils mettent leur confiance dans ces retranchements, dans ces fossés profonds, faibles barrières contre la mort ; mais n’ont-ils pas vu les murs de Troie, ouvrage de Neptune, s’écrouler dans les flammes ? Qui