Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/568

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guerrier. Les Rutules accourent de toutes parts pour se joindre à la mêlee.

Voyant son frère étendu sans vie, la fortune qui devient contraire et les dangers qui menacent les Troyens, Pandarus appuie fortement ses larges épaules contre la porte, la fait tourner avec effort sur ses gonds, et laisse en dehors des murs un grand nombre des siens engagés dans un sanglant combat, tandis qu’il enferme dans le camp une foule de Rutules qui s’y sont précipités. L’imprudent n’a pas aperçu l’audacieux Turnus s’élançant au milieu de la foule, et c’est lui-même qui l’enferme dans la ville, comme un tigre féroce au milieu d’un timide troupeau. Soudain un feu nouveau jaillit des yeux de Turnus ; ses armes retentissent avec un bruit effrayant : son aigrette sanglante s’agite sur sa tête, et son bouclier jette de brillants éclairs. Aussitôt les Troyens reconnaissent avec effroi son visage odieux et sa stature de géant. Pandarus, brûlant de venger la mort de son frère, s’avance et s’écrie : « Ce n’est point ici le palais qu’Amata te destine pour dot : tu n’es pas dans les murs d’Ardée, ta patrie, mais dans un camp ennemi, d’où rien ne pourra t’arracher. — Eh bien, lui répond Turnus avec un sourire dédaigneux, commence, si tu en as le courage, et viens te mesurer avec moi. Bientôt tu raconteras à Priam que tu as trouvé ici un autre Achille. »