Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/585

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Elle dit, et, en s’éloignant, pousse, d’une main encore savante dans son art, la poupe du vaisseau, qui fuit plus prompt que le javelot ou la flèche qui rivalise avec les vents : le reste de la flotte s’élance à sa suite. Frappé d’étonnement à la vue de ces prodiges, le fils d’Anchise y puise toutefois un nouveau courage ; et, les yeux levés vers le ciel : « Mère auguste des dieux ! ô vous qui protégez Dindyme et les villes couronnées de tours ; vous qui attelez à votre char des lions dociles au frein, c’est vous qui aujourd’hui me guidez aux combats ; confirmez cet heureux augure, et soyez-nous favorable. »

Il dit, et cependant la lumière, de retour, avait chassé devant elle les ombres de la nuit. Énée commande, et soudain les enseignes se déploient, les courages se raniment, et les guerriers se disposent au combat. Debout à l’extrémité de la poupe, le héros est déjà en présence des Troyens et de son camp ; puis, de la main gauche, il élève son bouclier resplendissant : du haut de leurs remparts, les Troyens poussent un cri qui monte jusqu’au ciel. L’espoir ranime leur fureur. Les traits pleuvent de leurs mains, aussi nombreux, aussi serrés que les grues du Strymon, lorsqu’elles traversent bruyamment les plaines de l’air, et qu’elles fuient l’Auster pluvieux en poussant des cris de joie.

Cependant cette ardeur des assiégés étonne le prince Rutule et