Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/663

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mette fin à cette guerre : c’est sur ce champ de bataille qu’il faut conquérir l’hymen de Lavinie. »

À ces mots, il se hâte de retourner à son palais. Il demande ses chevaux, et se réjouit de les voir, à son approche, frémir d’ardeur. Orithye elle-même fit jadis ce beau présent à Pilumnus : leur blancheur surpasse la neige, et leur course devance les vents. Autour d’eux, les écuyers, empressés, frappent leur poitrail d’une main caressante, ou peignent leur ondoyante crinière. Cependant Turnus charge ses épaules d’une cuirasse couverte d’or et d’airain blanc. Il ajuste son épée, son bouclier, son casque surmonté de deux aigrettes rouges. Cette épée, le dieu du feu l’avait forgée lui-même pour Daunus, père du héros, et l’avait trempée brûlante dans les eaux du Styx. Il saisit ensuite avec violence une énorme javeline, appuyée contre une haute colonne, au milieu du palais ; puis, brandissant cette arme, enlevée jadis à l’Aurunce Actor, et qui frémit sous sa main, il s’écrie : « Toi qui répondis toujours à mon appel, ô ma lance, voici le moment de servir mon courage. Le grand Actor te portait jadis, et te voici dans la main de Turnus. Fais que je puisse terrasser cet efféminé Phrygien, arracher, déchirer sa cuirasse, et souiller dans la poussière sa chevelure bouclée par un fer chaud et tout imprégnée de myrrhe. »