Page:Œuvres de Virgile (éd. Panckoucke, 1859).pdf/671

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tout à coup, s’abattant sur les ondes, terrible, il saisit dans ses serres tranchantes un cygne plus beau que tous les autres. Les Italiens sont tout entiers à ce spectacle : soudain, ô merveille ! tous les oiseaux, suspendant leur fuite, se rallient en poussant des cris, obscurcissent l’air de leurs ailes, et fondent, comme un nuage épais, sur leur ennemi : enfin vaincu par la force, et accablé par son fardeau, l’aigle lâche sa proie qui retombe dans le fleuve ; et il va se cacher dans les nues.

Alors les Rutules, saluant de leurs acclamations ce présage, étendent les mains pour saisir leurs armes. L’augure Tolumnius s’écrie le premier : « Voilà, oui, voilà ce que j’ai tant de fois demandé : j’accepte ce présage, et je reconnais la voix des dieux. C’est moi, moi qui vous guiderai ; prenez vite vos armes, ô malheureux, vous que cet odieux étranger se flatte d’effrayer par la guerre comme de faibles oiseaux, et dont les rivages sont désolés par la violence d’un insolent ennemi. Il fuira, et ses vaisseaux rapides l’emporteront au loin sur les mers : vous tous, d’un accord unanime, serrez les rangs, et défendez par les armes le roi qu’on veut vous ravir. »

À ces mots, il court, et lance, en face de lui, un javelot aux ennemis. Le trait vole en sifflant, et, inévitable, fend les airs. Aussitôt une immense clameur s’élève : tous les bataillons s’é-