Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/342

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dition, une triste médiocrité avec des craintes pour le passé et des soucis pour l’avenir ; et néanmoins il fut un temps où vous auriez écouté favorablement une telle proposition… Mais j’occupe un rang élevé parmi les nobles du pays, et je vous offre de partager, à titre d’épouse, mes honneurs et les richesses qui en découlent. Votre frère est mon ami, et approuve mes prétentions. Je relèverai votre ancienne maison… Vos actions seront réglées d’après vos désirs, même d’après vos caprices… Je pousserai si loin l’abnégation personnelle, que, si vous insistez pour une mesure si sévère, vous aurez une résidence particulière, une maison pour vous seule, et que je ne m’y présenterai jamais avant que l’amour le plus ardent, les attentions les plus tendres, aient triomphé de vos inflexibles dispositions. Voilà ce à quoi je consentirai pour l’avenir… Quant au passé, rien n’en transpirera dans le public ; mais il faut, Clara Mowbray, que vous soyez à moi. — Jamais ! jamais ! » s’écria-t-elle avec encore plus de véhémence. « Je ne puis que répéter le mot jamais ! mais il aura toute la force d’un serment. Votre rang n’est rien à mes yeux… votre fortune, je la dédaigne… Mon frère, d’après aucune loi, n’a le droit de forcer mes inclinations… Je déteste votre trahison et les avantages que vous pensez en retirer. Si la loi vous accordait ma main, elle ne vous donnerait qu’un cadavre. — Hélas ! Clara, dit le comte, vous ne faites que vous débattre dans le filet ; mais je ne vous presserai pas davantage pour le moment. Il faut que je songe à une autre rencontre. »

Il se détournait pour sortir, lorsque Clara, s’élançant vers lui, le retint par le bras, et lui répéta d’une voix grave et solennelle le commandement de Dieu : « Tu ne tueras point. — Ne craignez pas d’autre violence, » dit-il en adoucissant sa voix, et en tâchant de lui prendre la main, « que celle qui peut provenir de votre propre sévérité… Francis n’a rien à redouter de moi, à moins que vous ne soyez tout-à-fait déraisonnable. Accordez-moi seulement une permission que vous ne pouvez refuser à un ami de votre frère, celle de vous voir quelquefois… Suspendez au moins l’impétuosité de votre haine, et pour ma part je retiendrai le cours de mon juste ressentiment. »

Clara retirant sa main et s’éloignant de lui, se contenta de répondre : « Il est un ciel au dessus de nous, et nos actions y seront jugées ! Vous abusez d’un pouvoir que vous devez à la plus noire perfidie… Vous brisez le cœur d’une femme qui ne vous fit jamais de mal… Vous recherchez l’alliance d’une misérable qui désire ne s’u-