Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/262

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L’adepte, ainsi transformé en disciple d’un professeur de l’art occulte, suivit passivement Ochiltree au chêne du prieur, lieu que le lecteur peut se rappeler n’être pas éloigné des ruines, et où l’Allemand s’assit et attendit en silence les communications d’Ochiltree.

« Monsieur Dustandsnivel[1], dit le narrateur, il y a bien du temps que j’ai entendu raconter cette histoire ; car vous saurez que les seigneurs de Knockwinnock, non plus que sir Arthur, son père et même son grand-père, je me les rappelle tous un peu, n’aimèrent jamais à en entendre parler. Ils ne l’aiment pas mieux aujourd’hui, mais n’importe ; cela n’empêche pas qu’il n’en ait été question à la cuisine comme de bien d’autres choses qui, dans une grande maison, sont des sujets défendus dans le salon. J’en ai appris les circonstances de vieux serviteurs de la famille ; et aux jours où nous vivons, quand on cesse de se rappeler ces vieilles histoires de l’ancien temps autour du foyer à la veillée, la mémoire en est bientôt effacée, tellement que je ne crois pas maintenant qu’il y ait un individu dans le pays capable de vous raconter celle-là, excepté le laird lui-même pourtant, car il y a dans la bibliothèque du château de Knockwinnock un livre en parchemin qui en contient le récit.

— Tout cela est très pien… mais continuez fotre histoire, mon pon ami, dit Dousterswivel.

— Or vous voyez, continua le mendiant, c’est une affaire qui s’est passée dans ces vieux temps où le pays était plein de discordes et de querelles, quand chacun vivait pour soi et Dieu pour tous, et qu’un homme ne manquait pas de biens s’il avait la force de s’en emparer, et ne les conservait qu’autant qu’il avait assez de puissance pour s’y maintenir. C’était alors à qui l’emporterait sur son voisin par la violence dans tout ce côté de l’est, et les choses se passaient probablement de même dans le reste de l’Écosse.

« Or donc, dans ce temps, sir Richard Wardour arriva dans le pays, et c’était le premier de ce nom qui y fût jamais venu. Il y en a eu bien d’autres depuis, et la plupart, en comptant celui qu’on surnomma l’Enfer harnaché[2] ; dorment maintenant sous ces ruines. C’était une race d’hommes fière et cruelle, mais brave pourtant, et qui s’est toujours montrée prompte à soutenir les intérêts du pays. Que Dieu les sauve tous !… c’est un souhait où il n’entre pas

  1. Nouvelle altération malicieuse du nom de l’alchimiste, et qui cette fois correspond à « Monsieur qui n’entend pas bien. » a. m.
  2. Hell-in-harness, dit le texte ; harness signifie également armure ; ainsi il serait peut-être préférable de lire l’enfer armé : le lecteur choisira. a. m.