Page:Œuvres de monsieur Nivelle de La Chaussée, 1762, tome 2.djvu/336

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Ne pouvant engager mon épouse obstinée
D’aller, jusqu’à Poitiers, voir cette infortunée,
Et n’étant que trop sûr qu’elle veut, malgré moi,
Immoler à son fils cette triste victime,
Le détour que j’ai pris m’a paru légitime.
C’est la nécessité qui m’en a fait la loi ;
Et c’est, pour m’excuser, sur quoi je me retranche.

Doligni pere.

Le scrupule est plaisant ! Vous me faites pitié.
Eh ! trompez sans regret votre chere moitié.
Attraper une femme, est prendre sa revanche.

Monsieur Argant.

En un mot, j’ai pris ce détour.

Doligni pere.

Il est assez bon, ce me semble.

Monsieur Argant.

Et je n’ai si longtems retardé mon retour,
Que pour les mieux laisser s’accoûtumer ensemble.
Marianne a de quoi charmer ;
Et je m’en vais sçavoir si, pendant mon absence,
Ses charmes & son innocence,
De son aveugle mere ont pû la faire aimer…
La voici qui paroît. Laissez-nous, je vous prie.
Sur-tout ne dites point ce que je vous confie ;
Pas même à votre fils.