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Page:Œuvres de monsieur Nivelle de La Chaussée, 1762, tome 2.djvu/398

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Sur les égaremens de ce fils trop ingrat.
Si je l’ai toujours vû d’un œil un peu sévere,
Je n’en avois pas moins des entrailles de pere ;
Je l’aimois comme vous ; mais avec moins d’éclat.
Je tenois ma tendresse un peu plus renfermée ;
Et je ne demandois à votre ame charmée,
Que de cacher l’excès de son enchantement.
Hélas ! si quelquefois je vous en ai blâmée,
Excusez le motif ; trop sûre d’être aimée,
La jeunesse abuse aisément
Du foible qu’on a pour ses charmes.
Plus les enfans sont chers, plus il est dangereux
De leur trop laisser voir tout ce qu’on sent pour eux.
Je gémis du sujet qui fait couler vos larmes :
Votre courroux est juste ; Argant l’a mérité.
Mais si vous le voyez, comme je l’envisage,
Au milieu des transports & des fougues d’un âge
Où la raison n’est pas à sa maturité,
Vous devez conserver un rayon d’espérance.
Je l’ai laissé confus, honteux, mortifié.
Je vois que son état est digne de pitié.
Un malheur instruit mieux qu’aucune remontrance.
Il peut se corriger. Il est encore à tems.
Ce qu’il vient d’essuyer finira son yvresse.
Eh ! croyez qu’il n’est point de plus sûre sagesse
Que celle qu’on acquiert à ses propres dépens.

Mad. Argant.

Discourez un peu moins, & montrez-vous plus sage.

Mr. Argant.

Moi ?