Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/192

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d’occasion de la Bouille4, ou de Moulineaux. Saint-Évremond, ayant rejoint la cour à Ruel, lui apporta, pour la réjouir, l’histoire récréative de l’expédition du duc de Longueville, en Normandie : relation dans laquelle il couvre d’un ridicule éternel, la tentative de soulèvement et l’échauffourée piteuse des hobereaux de Normandie. Pour qui connoît le détail des affaires et des personnes du temps, la Retraite du duc de Longueville est un chef-d’œuvre d’ironie et un pamphlet délicieux. L’effet moral de cette pièce fut excellent, elle tourna les rieurs du côté de la cour ; le cardinal s’en montra fort satisfait. Dix ans après, il se la faisoit relire et s’en réjouissoit encore, de bon cœur, pendant la maladie dont il mourut. La langue françoise n’a pas, dans ce genre de littérature, un ouvrage où la causticité des traits soit plus délicate et plus mordante à la fois. Jamais le bon sens n’a parlé avec plus d’esprit. Ainsi, dans le temps que Condé châtioit les Parisiens, à Charenton ; dans le temps que Matthieu Molé confondoit les complots du duc de Bouillon et de l’archiduc ; Saint-Évremond, avec l’arme de l’ironie, attaquoit les frondeurs de sa plume acérée, et leur portait des coups sensibles. Tous ensemble préparaient, décidoient ou consolidoient la paix signée à Ruel le 11 mars 1649.

Pendant cette première époque de la Fronde, qu’on est convenu d’appeler la Fronde parlementaire, le prince de Condé avoit généreusement soutenu la cause du jeune roi ; et, malgré l’ascendant que


4. Voyez-en le récit piquant et détaillé, dans Floquet, tome cité, p. 321 et suiv.