Page:About - Le Fellah, souvenirs d'Egypte, 1883.djvu/337

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dernier tête-à-tête aux amoureux ; ils se jetèrent par complaisance dans une discussion philosophique où ils n’entendaient rien, et nous-mêmes peu de chose. Enfin toute la compagnie les ramena vers le quai ; ils remercièrent leurs nouveaux amis de l’isthme, et nous invitèrent pêle-mêle à passer deux ou trois mois d’hiver à Windcastle. Il fallut arracher Ahmed à la contemplation du canot invisible, qui s’était perdu dans la foule et dans la nuit.

— Eh bien ! lui dis-je, mon pauvre ami, la semaine est finie.

— Pas encore : et le dimanche ?

— Il est tout venu.

— Il n’est que commencé.

— Que vous a-t-elle dit ce soir ?

— Qu’elle m’aime toujours, mais qu’elle ne sera jamais ma femme. Si ce Longman voulait rester encore une quinzaine, je suis sûr que je gagnerais ma cause. Tout à l’heure je sentais son cœur battre avec force contre mon bras. Je n’ai pas accepté son adieu, ni voulu lui donner le mien. — Réfléchissez encore, lui disais-je, il ne faut qu’un bon mouvement pour changer le désespoir en joie. Je ne dormirai pas de la nuit, j’attendrai que Dieu vous inspire une généreuse pensée. » Elle n’a pas répondu non.

— Qui vivra verra ; couchez-vous toujours, cela repose.

— Plutôt mourir !…

Le dimanche à cinq heures et demie, lorsqu’on vint nous éveiller, mon premier mouvement fut de courir à sa chambre. Personne ; le malheureux ne s’était pas mis au lit. Il accourut, tandis que nous