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même essuyer ses yeux. Il était d’une laideur assez vulgaire, et sa douleur ne l’embellissait pas. Deux et trois hommes de son âge assemblés autour de lui travaillaient à le consoler ; il tenait à la main une lettre ouverte. Je m’avançai vers lui et je lui demandai ce qu’il avait ; car l’indiscrétion de ces bonnes gens est contagieuse. Il m’écouta d’un air abruti, sans répondre. Un de ses voisins me dit : « C’est une lettre qu’il a reçue de sa mère.

— Eh bien ?

— Elle est morte.

— Imbécile ! Elle n’est pas morte, puisqu’elle écrit.

— Oh ! monsieur, interrompit le patient, c’est comme si elle était morte. Lisez plutôt. »

Il me tendit sa lettre, et je la lus à haute voix, lentement, car elle était mal écrite et pleine de fautes d’orthographe, mais d’un style et d’une résignation antiques. Le pauvre diable, qui s’était fait déchiffrer cette triste nouvelle par un écrivain de la place, répétait chaque mot après moi, avec une douleur tranquille et profonde, et ses larmes continuaient de couler. Voici ce que sa mère lui écrivait :

« Mon fils, je vous écris ces lignes pour vous faire savoir que j’ai reçu le viatique et l’extrême-onction. Hâtez-vous donc de revenir ici, pour que je vous voie encore une fois avant de mourir. Si vous tardiez trop longtemps, vous trouveriez la maison vide de moi. Je vous salue tendrement, et je vous envoie ma bénédiction maternelle. »

Qu’en dites-vous ? Moi je ne pense pas que les héroïnes de l’ancienne Rome auraient fait meilleure contenance devant la mort. Et ne croyez pas que ce courage ait rien d’exceptionnel : Les Romains envisagent la mort natu-