Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/268

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Mme de Châteaufort se leva après ces mots et congédia Cornélius.

Au moment où le gentilhomme irlandais se retirait, elle lui prit la main et la lui serra fortement.

– Comptez sur moi, quoi qu’il arrive, dit-elle.

Au récit que M. de Nancrais lui fit de l’arrestation de Belle-Rose, M. de Luxembourg manifesta une grande douleur.

– Je ne sais pas encore si je puis beaucoup, dit le duc au colonel, mais croyez que tout ce que je pourrai est acquis à Belle-Rose. Je verrai le prince de Condé et m’entendrai avec lui sur cette affaire. Le plus triste est que M. de Louvois me hait. Mon nom est une méchante recommandation auprès du ministère.

– Et le roi ?

– Le roi attend ; il ne m’a pas encore éprouvé. Si je ne jouais que mon épée et mon rang, je n’hésiterais pas une minute à me rendre à son quartier ; mais j’exposerais Belle-Rose à tout le ressentiment de M. de Louvois sans avoir la certitude de pouvoir l’en garantir. Il n’est encore que prisonnier ; ne nous hâtons pas, de peur qu’on ne le traite en criminel. Mais, je vous l’ai dit, comptez sur moi.

Mme de Châteaufort ne perdit pas de temps et partit dans la nuit pour Paris. À son passage à Compiègne, le lendemain, elle se fit indiquer la demeure de Mme d’Albergotti et s’y rendit. Mme d’Albergotti quitta son mari pour la recevoir. Elle semblait fatiguée par de longues veilles et souffrante d’un mal secret. Geneviève se prit à la considérer un instant, cherchant à dominer son émotion. Au nom de Mme de Châteaufort, Suzanne avait étouffé un cri de surprise. Toutes deux se connaissaient sans s’être jamais parlé. L’une avait lu dans le cœur de Belle-Rose, l’autre avait su comment et dans quelles circonstances était mort M. d’Assonville.

– Que désirez-vous de moi, madame ? dit Suzanne, dont l’esprit ferme et honnête avait su le premier commander à son trouble.