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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

vous n’avez rien à redouter ; cependant, comme votre blessure ne vous permettrait pas de faire un aussi long trajet à pied, je vais aider vos domestiques à vous préparer un brancard.

Et avec cette adresse dont il avait déjà donné tant de preuves, en un tour de main le Canadien eut confectionné, avec des branches abattues à coups de hache, un brancard sur lequel on étendit les deux peaux de tigres.

— Maintenant, dit-il, adieu ; peut-être ne nous reverrons-nous jamais. Nous nous quittons, je l’espère, en meilleurs termes que nous ne nous sommes rencontrés : souvenez-vous qu’il n’y a pas de si vilain métier qu’un honnête homme ne puisse faire honorablement ; lorsque votre cœur vous inspirera une bonne action, ne soyez pas sourd et accomplissez-la sans regret, car c’est Dieu qui vous aura parlé.

— Merci, répondit le marchand avec une certaine émotion, un mot encore avant que nous ne nous séparions !

— Parlez.

— Dites-moi votre nom, afin que si quelque jour le hasard nous remettait en présence, je puisse faire appel à vos souvenirs, comme vous feriez appel aux miens !

— C’est juste, je me nomme Tranquille, les coureurs des bois, mes confrères, m’ont surnommé le tueur de tigres.

Et avant que le marchand fût revenu de l’étonnement causé par cette subite révélation du nom d’un homme dont la renommée était universelle sur les frontières, le chasseur, après lui avoir fait un dernier signe d’adieu, avait sauté de la plate-forme,