Page:Anatole France - Balthasar.djvu/94

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des principaux citoyens de cette ville. C’est pourquoi je suis venue à toi, afin que tu émeuves le cœur de ton époux en faveur des disciples de Jésus-Christ. Dis à cet homme riche : « Seigneur, ils sont nus, vêtons-les ; ils ont faim et soif, donnons-leur le pain et le vin, et Dieu nous rendra dans son royaume ce qui nous aura été emprunté en son nom. »

Læta Acilia répondit :

— Marie, je ferai ce que tu demandes. Mon mari se nomme Helvius, il est chevalier et c’est un des plus riches citoyens de la ville ; jamais il ne me refuse longtemps ce que je veux, car il m’aime. Maintenant tes compagnons, ô Marie, ne me font plus peur, j’oserai passer tout près d’eux, bien que des ulcères dévorent leurs membres, et j’irai dans le temple prier les dieux immortels, afin qu’ils m’accordent ce que je désire. Hélas ! ils me l’ont refusé jusqu’à ce jour !…

Marie, de ses deux bras étendus, lui barra le chemin.

— Femme, garde-toi bien, s’écria-t-elle, d’adorer de vaines idoles. Ne demande pas à des simulacres de marbre les paroles d’espérance et de vie. Il n’y a qu’un Dieu, et ce Dieu fut un homme, et mes cheveux ont essuyé ses pieds.