Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t2, 1906.djvu/106

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Le Vieillard.

Loin de moi le dessein, ô guerrier, d’offenser
Ce trophée où ton cœur ému vient se blesser
Au souvenir d’amis qui portèrent ces armes ;
Car je vois, à mon tour, tes yeux s’emplir de larmes,
Et j’ai respect, ô fils, de ton respect pour eux.
Ton chagrin même accroît la ferveur de mes vœux,
Et tu pardonneras si je laisse mon âme,
Plus que tu ne voudrais, abominer ce drame
Dont tu viens d’évoquer les éternels retours !


Le Guerrier.

Il est mieux d’oublier nos chagrins en ces jours,
Où le pays sauvé célèbre sa victoire ;
Qu’aujourd’hui nos douleurs se perdent dans sa gloire !
Le prix qui la paya ne doit point sembler cher ;
Notre cœur n’a le droit que d’être heureux et fier ;
Le laurier n’est point fait pour ombrager des larmes,
Pareil à ce soldat qui, tant qu’il a ses armes,