Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t2, 1906.djvu/124

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Le Guerrier.

Mais voici que déjà la journée accablée
Commence à respirer un souffle plus léger !
Le soir libérateur qui va la dégager
Des chaudes chaînes d’or dont elle était captive,
Par l’ombre avant-coureuse annonce qu’il arrive.
Les heures qu’il amène ont aussi leur douceur
Et leur bienfait. Sans doute, il reste en leur lueur
Un peu de passion fatiguée et de peine :
L’heure du rossignol, du phare et du phalène
Ne saurait ignorer tout ce qui fait souffrir.
Mais le jour se soumet et semble consentir,
Quand il vient se coucher parmi les ombres grises,
À cesser les combats nés de ses convoitises.
Tout s’incline avec lui vers la paix et la nuit,
La plante, le ruisseau, le vent, l’odeur, le bruit,
Notre corps dont la fièvre enveloppe notre âme.
Et l’âme qui remplit notre corps de sa flamme !
Ne sens-tu pas, vieillard, la paix de ce moment,
Et ne se peut-il pas que le soupir calmant
Qui paraît soulager la terre reposée
Pénètre en toi ? Les soirs ont aussi leur rosée !