Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t2, 1906.djvu/138

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Sans rien qui manque et rien qu’il faille qu’on retranche !
Parce que mainte année a fait ma tête blanche,
Je sais que la sagesse, aimant les jeunes fronts,
Est loin de réserver aux vieillards ses leçons.


Le Guerrier.

Qu’il soit donc fait selon ta volonté ! J’estime
Qu’un sentiment pareil, quoiqu’il en semble, anime
Ton cœur qui vit d’espoir et le mien qui vit sans.
Je le dis pour les deux : ils sont compatissants
Aux maux dont plus que toi je connais le spectacle.
Mais j’accepte le sort, tu rêves un miracle ;
Et cette loi d’airain que tu veux soulever
Je me crois impuissant à plus qu’à la braver ;
Sachant qu’elle est immense et qu’il faut être en elle,
Je vis ma vie en homme et non pas en rebelle.
Cependant ton effort, bien qu’il doive être vain,
Vaut de rester tenté, non pour ce qu’il atteint,
Non pour ce qu’il achève ; il suffit qu’il existe !
Et quoique l’insuccès le rebute et l’attriste,
Il tire de soi seul sa raison de durer ;
Son titre le plus haut, vieillard, est d’honorer