Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t2, 1906.djvu/154

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Sont les reines du monde, et d’immenses séjours
Où se déploient les cieux, et les vastes parcours
Des âges, et l’image innombrable des choses ;
Ainsi faut-il, vieillard, des cœurs où soient écloses
Des pitiés, des douceurs, dont les mots enchantés
Fassent naître, au cerveau des hommes transportés,
De longs espoirs de paix, de grands vœux de concorde,
Où tout un avenir s’harmonise et s’accorde
Hors des combats du monde et de leur cruauté !
Et tu créeras ainsi des fêtes de bonté,
Comme tes compagnons et frères les poëtes
Savent, par d’autres mots, célébrer d’autres fêtes.
Cela fuit, diras-tu ? Mais c’est aussi réel
Que la cité, la tour ou le mont immortel !
Lorsque le temps s’est clos sur la chose effacée,
Les siècles d’un volcan, l’instant d’une pensée
S’égalent, et tous deux, mêmement abolis,
N’étaient que deux aspects dans le néant cueillis,
Montrés un peu de temps, et rendus à l’abîme.
C’est pourquoi la douceur que ta parole exprime,
Et qui passe en rayon humide dans tes yeux,
Existe au même titre, ô vieillard, que les cieux !
Répands la bravement, reste celui qui sème
Le verbe qui conseille ou commande qu’on s’aime !