Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t2, 1906.djvu/164

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Se pourrait-il que sous ces vains jeux d’êtres vains,
Sous la déconcertante énigme des Destins,
Soit une inconcevable et gigantesque épure,
Un dessin conducteur, un plan de la nature,
Aux calculs infinis formés d’infinités,
Sur lequel se construit pour des éternités
Un incommensurable et divin édifice ?
Il a comme ouvrier l’œuvre exterminatrice
Qui se reposera, son travail achevé.
C’est un rêve, après tout, qui peut être révé.
Je le rêve parfois ! Le cours de ces étoiles
— Si pur quand la distance a caché de ses voiles
La tempête de feu qui nourrit leurs éclats —
Semble couper selon les ordres d’un compas
Les plans entrecroisés de savantes orbites.
Retours d’astres errants, rondes de satellites,
Le nombre et le calcul sont inscrits dans les cieux,
Immenses à l’esprit pensif bien plus qu’aux yeux.
Plus immenses selon que l’esprit est plus vaste.
Si l’on sait oublier qu’il dévore et dévaste,
Quel songe harmonieux peut être l’Univers !
Les voiles de souffrance et d’angoisse entrouverts,
Qui battent suspendus autour de notre vie,
Dans quelles beautés l’âme est aussitôt ravie !