Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t2, 1906.djvu/21

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Sont suspects, menacés, écartés de l’État,
Emprisonnés, proscrits. Et, sans eux, la contrée,
Par un continuel et légal attentat,
De sa sève appauvrie, et comme démembrée,


Est descendue aux mains inaptes au pouvoir
D’hommes sans dignité, sans force et sans génie,
Qui, pour la dominer, vers eux l’ont fait déchoir,
Jusqu’à plier sa gloire à leur ignominie.


L’histoire d’un grand peuple, et qui fut respecté,
Ne se compose plus, jusquà ce qu’il en meure,
Sur un fond de cynisme et de servilité,
Que d’appétits d’un jour et de pactes d’une heure.


Les gradins du sénat sont garnis de profils
Sortis des cabarets crapuleux de Suburre :
Lèvres lourdes, fronts bas, regards ternis et vils,
Visages où le sang semble une salissure !


Ces hommes vont traînant un parler de faubourgs,
Empuanti du vin dont s’alourdit leur langue,
Dans ces murs où Caton martelait son discours,
Où Cicéron versait l’ampleur de sa harangue !