Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t2, 1906.djvu/63

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le sol que tu pensais rendre à jamais stérile
Sera riche, et le sang que tu voulais servile,
Régénéré par toi, sera plus jeune et fort,
Plus ardent au travail, plus robuste à l’effort,
Plus certain de lui-même, et dangereux peut-être,
Un jour, aux petits-fils dont tu seras l’ancêtre.
La vie immense échappe aux prises de l’airain,
De ton œuvre héroïque il ne restera rien.
Elle se détruisait par son propre ravage,
Et s’anéantissait dans ce même carnage
Qui d’un coup la créait et qui la dévorait ;
Ainsi qu’un incendie, au bout de la forêt,
Meurt de l’embrasement dont sa gloire est éclose.
Et cesse d’exister avec le mal qu’il cause.


Le Guerrier.

Arrête toi, vieillard, et refrène tes mots !
Il se peut que le vol altier des javelots
Tombe avec l’ennemi que leur pointe transperce ;
Ta parole est pourtant imprudente et perverse,
Car la guerre demeure un mystère sacré,
Pour des desseins obscurs et profonds engendré,