Page:Angellier - Dans la lumière antique, Le Livre des dialogues, t2, 1906.djvu/69

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Sache donc que j’ai vu, depuis bien des années,
Leur lourd sceptre de fer aux mains des Destinées.
Mais si l’homme chétif ne peut changer leur loi,
Il peut la dominer de celle qu’il conçoit.
Et mettre, en lui cédant, de la tristesse humaine
Dans ce qu’il doit créer de meurtres et de haine.


Le Guerrier.

Et qui te dit, vieillard, qu’au moment où nos bras
Se détendent du dur bandement des combats,
Quand la nuit sur le champ de bataille s’abaisse,
Nos cœurs ne sont pas pris de soudaine tristesse
Pour ce peuple immolé, dans son sang endormi ?
J’ai quelquefois pleuré la mort d’un ennemi.
Et la main d’un vaincu serra souvent la mienne.
Nous repoussons la haine, à l’égal de l’hyène,
Qui rôde autour des camps et n’y pénètre pas ;
Elle ne franchit pas notre honneur de soldats !
Et crois-tu que j’ai vu les enfants et les femmes
Sortir, avec des cris, des chaumières en flammes,